À l’occasion du lancement des travaux du Parc d’activités des Forges, nous vous proposons une série consacrée aux Forges : histoire et patrimoine, projets… Découvrez les épisodes 1 et 2, concernant l’histoire du site.
Les Forges, une histoire en héritage : création et apogée
En un peu plus de 100 ans d’existence, l’installation des Forges à Inzinzac-Lochrist a bouleversé le quotidien de plusieurs milliers de paysans. En répondant aux besoins croissants des conserveries, les Forges ont dynamisé l’économie locale et façonné le paysage de la vallée du Blavet.
→ La Fondation des Forges
Au cours de l’année 1860, dans un contexte de Seconde Révolution industrielle, les frères Émile et Henri Trottier, ingénieurs des Arts et Métiers originaires d’Angers, prennent la décision ambitieuse d’établir une usine à fer-blanc, donc une aciérie, sur le site de Kerglaw, à Inzinzac-Lochrist. En se concentrant sur la production de fer-blanc, de fer imprimé et de fines tôles d’acier, les frères Trottier souhaitent profiter de l’essor du marché des conserveries de légumes et de poissons qui se développent à cette époque sur le littoral breton. Bien que basées à Inzinzac-Lochrist, elles adoptent le nom “Forges d’Hennebont”, en référence à leur siège social situé à Hennebont.
→ Un choix d’implantation décisif
Les frères Trottier ont choisi Inzinzac-Lochrist en raison de plusieurs facteurs stratégiques. Le Blavet offre une source d’énergie hydraulique à convertir en électricité grâce à la construction de barrages, et son eau sert au refroidissement des machines. Formidable axe de communication vers Hennebont et Lorient, il facilite le transport des matières premières et des produits finis, assuré par la flotte de péniches des Trottier. Le Bois de Trémelin fournit du bois pour la Charpenterie et la réalisation des modèles de fonderie. La main-d’œuvre locale, majoritairement paysanne et abondante, donc peu coûteuse, représente une aubaine pour les directeurs.
→ Acquisition par les Cirages Français
Les Forges restent une entreprise familiale jusqu’en 1882, date de leur rachat par la Société Générale des Cirages Français. Cette compagnie dominait alors 80% du marché des cirages, à l’époque où le cirage était omniprésent dans la vie quotidienne. Les investissements et les rendements s’intensifient après l’acquisition, avec la construction de nouveaux ateliers et l’installation d’équipements plus performants, tels que les 3 Fours Martin venant remplacer les hauts fourneaux à l’aciérie.
→ Les premières luttes sociales
Au début du XXe siècle, les ouvriers font face aux premiers mouvements de grève, se rapprochant progressivement du mouvement syndical. En 1903, une grève de 43 jours aboutit à une augmentation de salaire pour les 1800 grévistes. En 1906, de nouveaux mouvements visent à obtenir une journée de travail répartie en trois équipes de huit heures au lieu des 12 à 14 heures habituelles. La grève de 115 jours se termine par un échec pour les travailleurs, qui ne bénéficieront de la journée de huit heures qu’en 1925.
Au cours de la Première Guerre mondiale, l’activité continue. Les usines contribuent à l’effort de guerre en réorientant leur production de métal vers la fabrication d’obus et les Forges se voient doter d’une nouvelle Fonderie à cet effet en 1917. Les femmes prennent le relais des hommes dans les usines. Après la guerre, les activités reprennent progressivement et les hommes retrouvent leurs postes. Après une période d’intense activité et de modernisation, les Forges entament un lent déclin dès les années 1950. Cette « Bataille des Forges » pour préserver les emplois et l’identité industrielle d’Inzinzac-Lochrist forgera les esprits et l’ADN de ses habitants.
→ L’entre-deux-guerres
Les années 1920-1930 sont déterminantes pour la modernisation et l’organisation de la vie sociale ouvrière. Camille-Horace Herwegh prend la direction des Forges entre 1912 et 1938. Figure emblématique des Forges, il est également très apprécié des ouvriers. Grâce à lui, les Forges se développent avec l’addition de la Fonderie, de la Charpenterie et la mécanisation des laminoirs.
En 1936, les Forges accueillent plus de 3 000 ouvriers et produisent jusqu’à 33 000 tonnes de tôles et 9 000 tonnes de fer-blanc. Un dense réseau de chemin de fer sur Lochrist et deux nouveaux ponts permettent désormais de relier l’usine à la gare d’Hennebont. Une clinique dispensaire est installée à Saint-Piaux et de nouveaux logements sont construits à Langroix et la Montagne pour faire face à l’afflux de main-d’œuvre.
C’est l’apogée des Forges d’Hennebont.
⌛️ Les Forges, une histoire en héritage : déclin et fermeture
→ Le Front Populaire et les avancées sociales
En 1936, la coalition de gauche au pouvoir déclenche une vague de grèves, touchant aussi les Forges en juin. La majorité des ouvriers se mobilisent et obtiennent une augmentation de salaire de 12%, leur permettant d’accéder à de nouveaux biens de consommation comme la radio ou le vélo. À l’échelle nationale, les ouvriers gagnent 15 jours de congés payés. Ainsi, grâce aux péniches affrétées par l’usine, beaucoup d’ouvriers des Forges et leur famille vont pouvoir voir la mer pour la toute première fois.
Contrairement à la Première, la Seconde Guerre mondiale arrête la production. En 1940, sous occupation allemande, péniches, charbon et ouvriers sont réquisitionnés pour construire la base de sous-marins de Lorient, le mur de l’Atlantique, ou envoyés au STO. Les Forges cessent de fonctionner et les fours s’arrêtent en 1944-1945. Heureusement, les bâtiments ne sont pas bombardés, contrairement à Lorient.
→ La Bataille des Forges
Après la guerre, la production reprend mais le nombre d’ouvriers passe de 3000 à 1800. En 1950, les bons rendements poussent à moderniser l’entreprise avec la construction de nouveaux laminoirs entre 1952 et 1956. Cependant, la modernisation tardive et incomplète face à la concurrence française et allemande mène à des rumeurs de fermeture. Les aides apportées par l’État ne suffisent pas et les ouvriers se mobilisent à plusieurs reprises. En 1958, une manifestation rassemble 3 000 personnes à Hennebont.
En 1963, 25 000 manifestants défilent à Lorient. Malgré la solidarité, l’usine ferme en 1966 et l’activité cesse définitivement en 1969.
→ L’Écomusée des Forges
Face aux premières destructions du site des Forges dès 1970 qui bouleversent la population attachée à ses 100 d’histoire, une association est créée en 1972. Gisèle le Rouzic, fille d’ouvrier, fonde l’Ecomusée. Les ouvriers font don de leurs objets personnels et outils, et certaines machines des Forges sont conservées.
Ouvert en 1981, l’Écomusée offre un témoignage vivant de l’histoire industrielle d’Inzinzac-Lochrist.
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